Ensemble des Troubles Causés par l’Alcoolisation Fœtale (ETCAF)
L’opinion répandue que l’ETCAF est simplement dû au choix personnel de la femme est un obstacle majeur à l’efficacité des efforts de prévention. Les hommes ont aussi une responsabilité. La consommation d’alcool des femmes, et donc l’ETCAF, surviennent dans un vaste contexte d’incitation familial, culturel et social. Les conjoints, qui manifestent peu ou pas de soutien pendant la grossesse et qui peuvent aussi eux-mêmes abuser de l’alcool, devenir violents et exiger que leurs compagnes enceintes s’alcoolisent avec eux, partagent la responsabilité de ce problème. Les normes sociales qui encouragent la consommation d’alcool chez les femmes enceintes sont aussi responsables de l’augmentation du risque d’ETCAF.
Les prestataires de soins de santé et de services sociaux sont responsables quand ils n’informent pas sur les risques liés à la consommation d’alcool pendant la grossesse, n’apportent pas aux femmes une aide concrète à l’abstinence ou n’assistent pas les familles pour leur assurer une alimentation adéquate pendant cette période cruciale. La publicité pour les boissons alcoolisées, qui cible les femmes en âge de procréer, sans mise en garde sur l’utilisation de ces produits pendant la grossesse, est aussi responsable.
La société est responsable de son incapacité à aider la femme enceinte à affronter peur, angoisse, violence, malnutrition et problèmes de santé par des moyens autres que la consommation d’alcool. Les risques liés aux déterminants fondamentaux de la santé sont un enjeu sociétal.
Cette charte appelle les gouvernements à prendre des mesures pour accroître la sensibilisation sur l’ETCAF et sur les risques liés à la consommation d’alcool pendant la grossesse. Les gouvernements doivent promouvoir un message cohérent sur la prévention de l’ETCAF basé sur des preuves, en soutenant le développement et la diffusion d’une information de santé publique claire et cohérente : s’abstenir de consommer de l’alcool pendant la grossesse est la seule voie sûre pour prévenir l’ETCAF. Cette information doit être largement disponible dans tous les pays, répondre aux contextes locaux et être conçue pour faciliter l’accès aux services destinés aux femmes enceintes. En outre, la gestion des facteurs sociaux de la santé devrait s’intéresser tout particulièrement à l’ETCAF, à ses conséquences pour l’individu, la famille et la société et à sa prévention.
L’accès à une contraception fiable et abordable est une préoccupation importante à cet égard. Il faudrait donner une plus grande place à la prévention de l’ETCAF dans l’élaboration des politiques de prévention concernant la consommation d’alcool. La responsabilité de la prévention de l’ETCAF ne devrait pas être assumée uniquement par les femmes. La prévention est une responsabilité collective. Les actions devraient se concentrer sur les risques liés à la consommation d’alcool pendant la grossesse, sur l’accès à une contraception fiable, sur l’aide nécessaire pour permettre aux femmes de faire face à leur addiction et de s’abstenir de consommer de l’alcool pendant leur grossesse. Ce soutien inclut l’apport de soins prénataux opportuns, avec compassion et compétence.
Bien que l’information de la population sur l’ETCAF soit élevée dans quelques pays, elle est mondialement très faible. L’évaluation du degré de sensibilisation publique est une base nécessaire aux stratégies de prévention ciblées ou générales. La plupart des pays n’ont pas de données sur la prévalence de l’alcoolisation des femmes pendant la grossesse et pour l’ETCAF; dans d’autres pays, les données ne sont disponibles que pour quelques zones géographiques ou populations spécifiques. Une recherche sur l’incidence et la prévalence de l’ETCAF devrait être coordonnée à l’intérieur des pays et entre les pays pour guider les efforts de prévention et pour évaluer le succès des préventions spécifiques.
Le diagnostic de tout l’éventail des troubles demande une compétence que l’on ne trouve pas dans la plupart des pays. La collaboration internationale dans le diagnostic de l’ETCAF devrait par conséquent être encouragée comme une étape majeure pour acquérir cette capacité diagnostique et relier cette connaissance à la prévention primaire et secondaire.
Egon Jonsson, Amy Salmon, Kenneth R Warren
The Lancet Global Health, Volume 2, Issue 3, Pages e135 – e137, March 2014
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